Buenos Aires – Ushuaia en tout terrain
"Défi sportif et objectif humanitaire"

Nous avons donc changé notre programme pour concentrer notre voyage sur l’Argentine, où il n’y a moins de difficultés à rouler avec des véhicules non-immatriculés. La livraison des quads par avion s’est donc faite à Buenos Aires tout simplement. Aller/retour Dubai - Buenos Aires
En deux mots :
Nous avons relevé notre défi en parcourant 5675 km en bivouac et autonomie totale, dépendants de nos machines, de notre matériel et des ressources locales, avec environ 4200 km en tout terrain...
Une magnifique aventure, des paysages sublimes, des gens très sympa et un énorme plaisir de quadeur ;)) . Les lacs et montagnes, les grandes plaines infinies des régions les plus isolées de la Patagonie, l’arrivée à Ushuaia, nous laissera un souvenir impérissable.
Les participants :
Franck et Fred, les deux frangins !
Parcours en bref :

Canuelas - Dudignac
Dudignac - San Raphaël
San Raphaël - Buta Ranquil
Buta Ranquil - Neuquen
Neuquen - Bariloche
Bariloche - Buen Pasto
Buen Pasto - Sarmiento
Sarmiento - Perito Moreno
Perito Moreno - El Calafate
El Calafate - Embarcadère
Embarcadère - Ushuaia
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Quelques chiffres :
Nombre de jour de voyage : 20 jNombre de km réalisés : 5675 km (4200 environ en Tout terrain)
Nombre d’heures roulées : 86h
Altitude maximum : 2450 m
pointe de vitesse : 132 km/h
Ecarts de température en février : 5° à 25°
Nombre de litre d’essence consommés : env. 400 L/quad
Nombre de crevaison : 1 !! Merci les pneus Maxxis
Album photo
Vers Ushuaia par les pistes

Lorsque les terrains étaient trop difficiles, nous n'avons malheureusement pas pris le temps de nous arrêter pour un cliché. Beaucoup des photos ont été prises en roulant...
Buenos Aires – Ushuaia en tout terrain from Frédéric Daubié on Vimeo.
Compte-rendu du voyage
De Buenos Aires à Ushuaia au guidon de deux 700 Raptor préparés, soit plus de 5600 km, dont 4200 km en tout terrain en une quinzaine de jours et en autonomie totale.


Jour 1
Buenos Aires ! Après 14h de vol et une escale à Madrid, nous y sommes enfin. Il fait 30° environ avec un grand ciel bleu, nous quittons l'aéroport enthousiastes et motivés. Une vingtaine de minutes d'autoroute dans un taxi poussif nous amène aux pieds d'un petit hôtel bon marché du centre historique. Une petite douche rapide et nous repartons à la recherche de deux objets précieux et rigoureusement indispensables : des batteries.
Les quads sont arrivés la veille, mais pour des raisons évidentes de sécurité, ils voyagent sans essence et sans batteries. Francky a bien tenté le coup d'essayer de les passer en soute au départ de Dubaï, mais sans succès !
Nous nous retrouvons donc à arpenter anxieusement la ville pour finir par les trouver chez un revendeur de mobylettes très motivé pour nous aider. Cette mission essentielle accomplie, nous consacrons le reste de l'après-midi à du tourisme de base et tombons par hasard sur une boutique spécialisée dans les équipements de montagne. Nous achetons un camping-gaz qui remplacera avantageusement notre petit réchaud de survie et ses pâtes allume-feu.
Il est 20h10, il fait encore grand jour ! Les rues sont très animées, nous nous arrêtons devant un cercle compact de curieux qui se régalent du spectacle de deux danseurs portés par le rythme endiablé d'un tango. A l'angle d'une rue animée, un jazz-man, une terrasse agréable, un resto prometteur. Nous craquons pour une " picada ", superbe plateau de fromage et de charcuterie, habilement présenté... Nous nous régalons autant du plat que de l'ambiance.
Jour 2
Nous ne nous sommes pas levés tard, le décalage horaire certainement, ou l'excitation du voyage. Ce dimanche matin ensoleillé, les rues commencent à s'animer. La ville est calme et agréable, nous nous posons dans un café resto de centre ville pour un copieux petit déjeuner.
Centro, Retiro, Recoleta, Palermo, ruelles et longues avenues aérées, parcs aux essences variées, nous allons et venons toute la journée avec frénésie pour profiter de cette grande ville d'une richesse étonnante.
Les quartiers sont animés de multiples spectacles de rue, du tango toujours et encore, des marionnettistes, des musiciens, etc. Nous tombons par hasard sur une troupe de voltigeurs drôles et très athlétiques qui manifestement enthousiasme la foule et nous nous régalons du spectacle, ils sont très bons.
Nous sommes de retour à l'hôtel et pensons à breveter une solution de séchage du linge. Francky a accroché ses chaussettes aux lourdes pales du ventilateur suspendu... le résultat est remarquable !
Cette journée marathon se termine à la terrasse d'un petit resto dans une rue piétonne. Bien rougis par le soleil mordant de l'hémisphère sud et rassasiés, nous rentrons tranquillement à l'hôtel.
Jour 3
Nous nous rendons chez l'agent de transport qui a réceptionné les quads vendredi dernier. Ils nous confirment que les machines sont bien là et qu'il nous faut aller les dédouaner. Maria, une charmante jeune femme dynamique nous accompagne. Toutes les formalités se passent bien, mais le douanier est intraitable, sans certificat d'assurance local il ne laissera pas sortir les quads. Avec l'aide précieuse de Maria, nous entamons des démarches. Le temps passe, rien ne pourra se faire avant demain.
Résignés, nous rentrons à Buenos Aires. Pour autant, le bilan n'est pas négatif, nous avons trouvé une assurance et Maria nous communique un contact à Ushuaia, encore une Maria, qui se chargera du retour des machines.
Nous consacrons notre fin d'après-midi dans le sulfureux quartier de la Boca. L'ambiance y est festive, les baraquements en tôles rafistolés avec rien et les maisons délabrées peintes de couleurs vives donnent un intérêt touristique à ce quartier misérable. ça et là des spectacles de tango, des musiciens, mais surtout beaucoup de rabatteurs et des vendeurs de babioles.
Le quartier n'est pas sûr, " dit-on ", en repartant, un ado à vélo tente de m'arracher mon appareil photo. Bon réflexe heureusement, il aura simplement le droit à un bon coup sans sommation ! Nous finissons notre soirée, l'esprit focalisé sur la déterminante journée qui nous attend.
Jour 4
Nous sommes anxieux, il semble très difficile de faire dédouaner les machines. Les tergiversations entre le transporteur, l'assureur et la douane vont bon train. Toute l'équipe de la compagnie de transport se mobilise. Les quads n'ont pas de carte grise et donc pas d'immatriculation pour rouler sur la route, c'est l'impasse ! Vers midi Diégo reçoit un appel de la douane. On-t-ils un titre de propriété ? Oui, une facture d'achat ! C'est en fait une facture globale intégrant toutes les modifications que nous avons fait faire in-extremis avant le départ au cas où. J'ai trouvé une solution, tout est désormais en conformité, mais il faut compter plusieurs jours, pour faire quoi exactement, on ne sait pas vraiment !
Diégo, un peu gêné, nous fait comprendre qu'un douanier peu scrupuleux accepterait d'accélérer la manoeuvre, mais ce n'est pas gratuit. Bienvenue en Argentine ! Nous n'avons pas le choix et acceptons. Sur place, le douanier laisse la main à un jeune type, nous ne savons pas exactement quel est son rôle, mais il a bien compris la situation, sans " tricher " il est impossible d'arriver à nos fins. Manifestement, il trouve des combines, dédouane les quads comme de simples colis et fait venir un camion pour les sortir à 200 mètres de là, à l'extérieur de l'enceinte. Car il est interdit de les faire rouler sur la route
Il est 16h, nous n'avons rien dans le ventre, le ciel est noir, il pleut, mais la perspective d'une solution nous réjouit. Le camion arrive, le chargement se fait, comme prévu. Ils nous déposent les " paquets " sur le parking, sous une pluie battante. Nous mettons deux heures à nous préparer, nos bagages sont trempés, nous sommes à tordre !
La bagagerie n'est pas au point, mais nous prenons la route. Il fait nuit, la pluie redouble de violence, nous roulons prudemment vers Canuelas.
Nous finissons par nous poser dans une auberge familiale et bruyante, au bord de la route où nous avons le malheur de dire que nous sommes Français, une veille de rencontre " footbolistique " France-Argentine. Avec quelques bières et la fatigue, curieusement notre espagnol devient plus fluide.

Jour 5
Mécanique indispensable ce matin. Nous venons de nous rendre compte que la durite qui pompe l'essence dans nos réservoirs additionnels est trop courte et consacrons la matinée à tout remettre en ordre. Il fait une magnifique journée, nos affaires sèchent au soleil.
Vers 15h, nous quittons le bitume, avec que l'embarras du choix. La campagne est traversée de longues pistes qui séparent les champs, formant un immense damier.
Nous passons l'après-midi à foncer sur ces longues pistes roulantes, un oeil sur le GPS pour ne pas perdre le cap et négociant tout en glisse, de temps à autre, de larges virages à angle droit.
Premier bivouac, nous nous posons dans la campagne, près d'une ferme, sur une herbe rase, un sachet repas déshydraté fait notre bonheur. Il est déjà minuit, il fait bien frais, nous sommes calfeutrés dans la tente et préparons à la lampe frontale notre itinéraire avec pour objectif d'optimiser au mieux notre trajectoire pour rejoindre San Raphael à 800 km de là !
Vers 1h du mat, nous nous faisons réveiller par des curieux en extase devant ce spectacle insolite. Au petit matin, un gaucho bienveillant et très sympathique, sur une magnifique monture et accompagné de ses trois chiens, inquiet de ce désordre sur sa ferme, vient nous rendre visite. Nous échangeons quelques brèves paroles pour lui expliquer que nous sommes en route pour Ushuaia. Ce projet l'interpelle. Il ne doit pas vraiment y croire, mais poliment nous salue, nous souhaite bon voyage et repart au galop.
Jour 6
Ce matin, nous sommes déterminés à faire une grosse journée pour rattraper notre retard et nous rassurer sur nos chances d'atteindre notre destination à temps. Nous nous lançons le défi un peu fou de rejoindre San Raphael pour y dormir.
De la piste, de la poussière, des paysages de campagne à l'infini, nous traçons à vive allure et prenons beaucoup de plaisir sur ces pistes endurantes et sans difficultés.
Petites pauses rapides et régulières pour se restaurer, points de navigation, quelques étirements et nous repartons inlassablement.
Partis à 9h ce matin, nous tenons ce rythme jusqu'à 4h du mat... soit 18h de selle pour 900km... pari tenu, nous sommes à San Raphael ! On comprend mieux pourquoi nos copains ne veulent plus nous accompagner dans nos galères.
Jour 7
Levé difficile ce matin et pour cause ! Nous sommes dans un petit camping en pleine période touristique, fréquenté que par des argentins et profitons pleinement des installations, en particulier pour faire une bonne lessive.
Nous sommes préoccupés par les machines qui donnent quelques signes de fatigue au niveau des nerf-bars qui portent les réservoirs latéraux et des porte-bagages arrières. L'ambiance est un peu spéciale, tous les enfants du camping défilent avec leurs parents pour se faire prendre en photo au guidon des engins, tandis qu'entre deux poses, nous essayons tant bien que mal, les mains noires de cambouis, de faire l'entretien nécessaire.
Jour 8
Nous nous levons " à la cool ", travaillons sur notre itinéraire du jour et partons vers 11h. Nous remontons le Rio Atuel, enchaînant de belles pistes et des routes défoncées. C'est drôle, les pistes sont certainement plus roulantes que les routes en bitume ! Puis nous prenons un cap plein ouest, vers la cordillère des Andes, sur une piste fantôme, inscrite ni sur nos cartes, ni sur le GPS et qui, sur 140km environ, dans un décors naturel grandiose, traverse un plateau à 1500 mètres d'altitude.
Nous finissons par rejoindre la mythique RN40 et alternons routes et pistes, pour finir par nous poser sur la terrasse d'un petit fast food latino, seule boutique ouverte de cette petite ville totalement éteinte.
Le patron est très sympa, nous sert un poulet rôti et une purée maison pour 6 personnes au moins... nous profitons pleinement de ce pantagruélique repas.
Lourdement lestés, nous repartons sur une piste de montagne difficile et cassante pour une centaine de kilomètres à batailler à faible allure, dans des paysages à couper le souffle. Le temps se couvre, le ciel bas devient noir et vire à la pluie. De puissants grondements accompagnés d'éclairs lumineux raisonnent dans la vallée. Nous avons mal évalué notre parcours, en pleine nuit, loin de tout, nous finissons par rejoindre la RN40. Vers minuit, nous apercevons furtivement une petite pancarte " Hôtel " discrètement posée sur le bord de la route. Nous la suivons, assez content de ne pas avoir à bivouaquer sous la pluie. Nous serons plus prévoyants les jours à venir.

Jour 9
Ce matin, nous appliquons les bonnes résolutions prisent la veille de se lever désormais à 6h ! Il nous faut être très prudents sur l'estimation du parcours, car certaines portions de tout terrain sont très accidentées et font chuter notre moyenne. La distance qui nous sépare d'Ushuaia est encore énorme, probablement 3000 km. Le soleil se lève, une superbe journée chaude et ensoleillée s'annonce.
L'option raisonnable aurait été de prendre une piste plein sud, mais la tentation est trop forte de faire une grande boucle de 160 km dans la montagne pour le plaisir du pilotage et des yeux.
La piste serpente nerveusement sur un relief très varié. Les perspectives profondes des montagnes ciselées aux sommets encore enneigés, sur des vallées verdoyantes, nous offrent un spectacle saisissant dont nous profitons furtivement entre deux virages.
Sur l'heure du déjeuner, nous comptabilisons déjà 250 km de pur plaisir. " Le " resto du village ne propose qu'un menu ! L'endroit n'est pas désagréable. Le patron nous apporte la gamelle de ce qui mijotait en cuisine.
Petit coup d'oeil sur les machines... surprise ! Une crevaison. Nous sortons le kit de réparation, mèches et cartouches de gaz, rien de grave.
Nous devons refaire notre retard pris à faire les fous de la glisse ce matin. Les quadeurs comprendront - et oui, tout se paye ! Nous décidons de rejoindre Neuquen par la départementale. C'est interminable ! Il fait une chaleur étouffante, la ligne de bitume est tirée au cordeau sur plusieurs centaines de kilomètres, traversant un plateau aride et austère, que quelques pompes à pétrole, d'un autre âge, animent tristement.
Contrôle de police, encore un ! Nous sortons le grand jeu, présentons tous les papiers, le policier déchiffre avec beaucoup de soin nos fausses plaques et les cartes d'assurances associées toutes aussi fausses. Leurs registres soigneusement complétés, ils nous laissent filer.
Nos véhicules sont parfaitement en règle et nous avons souscrits une assurance locale, mais les fonctionnaires au képi n'étant pas habitués à voir ce genre d'engins motorisés, il était préférable de ne pas les contrarier, au risque de se lancer dans des explications bien difficiles.
Nous déplions notre habitat optimisé de nomades pressés au camping municipal près de la rivière, dans un petit coin abrité du vent. Il y a un monde fou, à croire que tous les habitants de cette petite ville font leur sortie dominicale ici. Nos Raptors font encore l'admiration des grands et des petits...
Jour 10
Levé 6h. Nous cherchons un moment le waypoint qui marque le départ d'une spéciale du Dakar. Le levé de soleil est magnifique, mais la température très nettement plus fraîche que les jours précédents. La piste alterne des parties en boue séchée avec d'immenses ornières et de longues portions sableuses. Nous sommes sur un plateau démesuré, entouré de hautes montagnes, le ciel semble irréel, comme maladroitement peint !
Dans une grande ligne droite sur laquelle nous poussons le régime, mon moteur prend soudainement des tours et plus d'entraînement... la boite est morte ? ... heureusement non ! Nous sommes à 150 km environ du prochain village. Il s'agit simplement de la couronne arrière, qui à force d'usure a perdu toutes ses dents. Nous avons deux kits chaîne complets. Dans la poussière de cette plaine balayée par de fortes rafales de vent glacial, nous réparons et repartons.
Vers 13h10, nous arrivons dans un hameau très isolé de 30 ou 40 âmes. A première vue il n'y a rien ! Nous demandons s'il est possible de manger quelque chose. On nous conduit à une petite maison bleue décorée d'une fresque. Nous déjeunons à la table familiale, l'ambiance est pittoresque et très sympathique.
Profitant de ce relatif confort, nous changeons la couronne arrière du quad de Francky avant qu'elle ne lâche à son tour, remercions chaleureusement nos hôtes et repartons.
Au fil de la journée, la température baisse aussi vite que le vent redouble de violence. Nous filons sur d'immenses pistes dans une nature préservée au milieu de paysages d'une beauté incroyable.
Nos machines ont plus de 700 km d'autonomie avec le réservoir principal et les deux réservoirs additionnels de 22L, équipés d'une pompe commandée au guidon. Ce système astucieux nous permet de faire le plein en roulant. Le truc, c'est qu'il ne faut pas oublier de couper la pompe lorsque le plein est fait, sinon... ça déborde et c'est douche à l'essence !!
Après 520 km de piste, nous arrivons à Bariloche, aux portes de la Patagonie. Petite ville de montagne " proprette " aux nombreux chalets de bois, posée près d'un grand lac, on se croirait en Suisse.
Une vidange moteur s'impose, déjà 2800 km de poussière depuis Buenos Aires, les machines sont soumises à rude épreuve.
Après quoi, nous nous installons dans un camping très chic où nous sommes seuls. Le patron nous accueille très gentiment et met toutes les installations à notre disposition. Douches propres et chaudes, pas de vent, super journée !

Jour 11
Comme des riches, nous allons prendre notre petit déjeuner à Bariloche, ça change du camping-gaz aux pieds de la tente !
Nous cherchons à faire nettoyer nos filtres à air et devons prendre le temps d'un point mécanique sérieux. Nos porte-bagages en alu ont cassé, il faut absolument les réparer. Nous trouvons un soudeur très professionnel qui sait travailler l'aluminium. Il nous fait un boulot impeccable.
Fin de journée tranquille, tourisme à Bariloche, grillades en plein air au camping et grosse nuit réparatrice.
Jour 12
Nous devions partir à 5h, il est 6h, nous émergeons difficilement, nous nous préparons à la hâte et filons. Francky met un point d'honneur à alléger son minuscule sac, il se débarrasse de l'inutile, notion très relative lorsque l'on baroude !
Nous empruntons un petit bout de nationale au coeur des montagnes. Le soleil n'est pas encore levé, il fait un froid de canard, mais nous sommes récompensés de nos efforts par une lumière d'aurore sur les lacs et cimes enneigées.
Nous trouvons le début de la piste qui, étroite et sinueuse, monte très rapidement sur le flanc de la montagne. Nous la suivons studieusement sur nos petits écrans jusqu'à ce qu'elle s'évapore... sûrs de notre cap et guidés par la topographie du terrain nous poursuivons pour rattraper une petite piste le long d'une voie ferrée désaffectée.
En traversant un petit village, Francky stoppe net devant une petite auberge qui semble fermée. Nous nous présentons. Deux hommes à l'arrière font du béton. Ils nous accueillent. Lumière, télévision satellite, friteuse, les maçons se transforment en cuisto, la mère et la fille débarquent, plient un lit de fortune resté au milieu de la pièce, tout le monde s'affaire à nous préparer un repas et nous servir.
Nous repartons très motivés pour faire tourner le compteur. Les pistes sont très roulantes, nous filons plein sud au beau milieu de la Patagonie.
Les locaux disent qu'il voient les quatre saisons tous les jours... c'est vrai ! Les écarts de température sont impressionnants et la pluie et le soleil se chamaillent toute la journée.
Nous décidons de prendre un raccourci en coupant à travers la montagne. La piste devient très étroite et difficile, nous forçons certainement plus sur la mécanique et là, loin de tout, dans un paysage grandiose, je casse les roulements arrières. L'arbre se désaxe. Immobilisation immédiate. Francky a filé sans se rendre compte de rien. Je reste là seul et dubitatif devant ma machine hors d'usage.
Une réparation sur place est impossible, le village le plus proche, Buen Pasto, 120 habitants, se trouve à 60 km. Nous tractons laborieusement le quad sur le terrain chaotique, pour finir par arriver vers 1h du mat. Première maison, il y a de la lumière, nous frappons à la porte et rencontrons Mirta, l'infirmière du coin qui très gentillement nous installe dans le dispensaire du village.
Il y fait bien chaud, nous racontons tant bien que mal notre mésaventure, ... Il est 2h du mat, nous nous sommes levés à 6h et avons parcourus 749 km... les connexions ne se font plus !
Jour 13
Francky se lève inspiré et optimiste ce matin, avec dans l'idée de récupérer deux des quatre roulements de son quad pour les mettre sur le mien et nous permettre de repartir. Après démontage, nous constatons les dégâts. Il n'y a plus une bille, les quatre roulements sont littéralement broyés et l'entretoise très endommagée.
Pour ne pas prendre le risque d'abîmer les deux quads, nous changeons de stratégie et enroulons une pièce de Jean's bien serrée autour de l'axe avec beaucoup de graisse et repartons au pas vers le prochain village à 90 km, où parait-il, il y a un mécano.
A rouler au pas, nous surprenons un tatou, des émeus, des lamas et surtout de magnifiques rapaces aux envergures impressionnantes.
Lorsque nous arrivons enfin, les frottements de ferraille arrachent au quad des cris de souffrance qui nous font de la peine.
Ce n'est pas un garage, mais une " Goméria ", un spécialiste du pneu. Nous expliquons notre problème, l'employé prend sa voiture et revient avec un jeune homme éclairé qui prend les choses en main. Sans être vraiment sûr d'une solution, nous passons l'après-midi à attendre dans le garage. La musique braille, les employés s'affairent. Ils ont enfin trouvé des roulements approchants, mais il faut réusiner le cylindre dans lequel ils se logent. La machine ne sera prête que demain après-midi.
Nous finissons la soirée dans un petit resto où le patron vente les qualités de la " milanésa " maison que nous accompagnons d'un coup de pinard local très correct.

Jour 14
Vers 10h, comme convenu, nous retournons au garage. Accompagné de deux mécanos, Francky part chercher les précieux roulements et la pièce usinée. Cette réparation de fortune devrait nous permettre de repartir, mais compromet totalement la piste qui sollicite beaucoup trop les machines. Nous n'avons plus le temps de prendre le risque de nous retrouver à nouveau " plantés " loin de tout ! Le temps nous est compté, il doit encore rester 1500 km . Nous décidons de descendre sagement par la route.
La machine enfin en état, nous repartons vers 17h pour rejoindre la RN40 et faisons un grand détour par le nord pour éviter quelques dizaines de km de piste. Quelques minutes après le départ, l'attache rapide de ma chaîne, mal refermée, s'ouvre. La chaîne casse !
L'ironie du sort nous fait découvrir que la très mythique route nationale n°40 qui parcours le pays du Nord au Sud aux pieds de la cordillère, que nous imaginions en parfait asphalte lisse, est parfois bitumée, mais la plus part du temps en remblais plus ou moins stable.
Nous roulons avec prudence jusqu'à 21h, avant de nous poser dans le fond d'un jardin où une famille tranquille a improvisé un camping.
Jour 15
4h10, la sonorité métallique de l'i-phone, qui nous sert de couteau suisse de l'info et accessoirement à nous mesurer au Sudoku, nous sort du sommeil. Curieusement, nous sommes tous les deux en grande forme, prêts à attaquer une grosse journée. Un peu avant 6h, nous nous rendons à la station service pour faire les pleins avec dans l'idée d'y prendre un petit déjeuner. Le snack est fermé, nous partons le ventre vide.
Nous ne verrons encore pas d'asphalte sur cette longue portion de RN40. Parfois étroite, et sinueuse, parfois parfaitement rectiligne et aussi large qu'une autoroute, mais en tôle ondulée. Nous avons l'impression de voyager assis sur un marteau piqueur !
Après plusieurs heures et une panne de pompe à essence réparée à la hâte, nous apercevons sur nos écrans de GPS, un point en approche signalant un petit village. Nous y trouvons un petit hébergement pittoresque et y prenons un petit déjeuner, sans vraiment réussir à nous réchauffer.
Nous atteignons El Calafate en fin d'après midi. C'est une ville touristique animée, connue pour la beauté du glacier Perito Moréno, situé à 80 km environ.
Bien qu'ayant déjà parcouru 700 km depuis ce matin, nous décidons de rejoindre directement le parc naturel, pour profiter de ce beau soleil de fin de journée.
La coulée de glace, haute de 60 mètres, tombe à pic dans une eau turquoise. La lumière du soleil rend certaines parties translucides et les irisent de reflets bleutés, le spectacle est saisissant. De temps à autre un sourd craquement raisonne dans la vallée et laisse tomber quelques tonnes de glace, provoquant un léger désordre dans ce tableau figé.
Des images plein la tête, nous finissons notre soirée à El Calafate... avec un bon vin de Mendoza...
Jour 16
Une petite voix fluette nous interpelle en Français. C'est un petit garçon très curieux qui vient nous poser mille et une questions. Les parents et la petite soeur nous rejoignent. Ils voyagent en "cabanon" à 4 roues (http://www.lecabougnot.com/) depuis deux ans déjà et les petits suivent une scolarité à distance. Ayant bien bourlingués en terre de feu, ils nous donnent quelques tuyaux de voyageurs.
Nous partons vers Rio Galéros. Certainement trop habitués à jouer sur les pistes, je trouve cette portion de route longue et monotone.
Dans l'après midi, le ciel se couvre brutalement, devient noir, la température baisse de façon très significative et comme tout le temps le vent souffle très violemment. Nous prenons une saucée mémorable. Le déluge ne va durer que ¾ d'heure environ et comme par enchantement nous voyons réapparaître le soleil et le ciel bleu. Fin de vie pour l'appareil photo resté dans une poche ouverte !
Formalités douanières tatillonnes, nous passons au Chili, pour rejoindre la Terre de Feu et filons plein sud pour nous arrêter au détroit de Magellan. De l'autre côté, il n'y a rien avant 60 Km au moins, il est tard, il fait 5°, prudents nous plantons la tente sur un terrain vague derrière l'embarcadère, au pied d'un conteneur pour nous abriter du vent et passer la nuit.
Jour 17
Premier bateau. Une demi-heure de traversée. Nous voilà sur la " Terra del fuego ". La nationale est encore une piste, nous roulons à vive allure, doublant camions et voitures. Nous sommes en plein été austral, pourtant il fait encore bien froid. Nous avons cette sensation plaisante des rares journées d'hiver ensoleillées, avec ce contraste permanent du vent qui saisi et du soleil qui réchauffe.
180 km de cette piste très ludique et nous voilà de nouveau à la frontière pour quitter le Chili et retourner en Argentine. Les douaniers se demandent pourquoi nous n'avons pas de carte grise, pourquoi les numéros ne correspondent pas... ils nous laissent filer sans trop chercher à comprendre... chance !
Rio Grande. C'est une ville d'une relative importance avec un centre ville très animé comptant de nombreuses boutiques " branchées " et une périphérie très étendue faite de vastes quartiers défavorisés dans lesquels nous avons tourné un bon moment par erreur.
Dernière étape vers notre destination, il reste une poignée de km, les paysages changent, nous arrivons en montagne.
L'arrivée sur Ushuaia est superbe. L'unique route étroite serpente dans la montagne entre lacs, rivières et bras de mer, nous offrant sous la lumière crépusculaire de cette fin de journée, des panoramas grandioses sur fond de pics enneigés.
Ushuaia ! Nous y sommes enfin, après 5675 km parcourus dont 4200 environ en tout terrain. Très excités, nous nous arrêtons glorieusement devant le panneau d'accueil à l'entrée de la ville " Bienvenidos a la ciudad mas austral del mundo " qui n'a aucun autre intérêt que de faire un cliché symbolique... enfin pour nous !
Heureux et fiers d'avoir relevé ce défi sportif de rallier, en tout terrain et sans assistance, Buenos Aires à Ushuaia, nous remercions nos sponsors et partenaires, Panalpina, Solunix, Yamaha Motor France, Quad passion magazine, Précision, qui nous ont fait confiance et sans qui ce voyage n'aurait certainement pas été possible.
Grâce à leurs soutiens, nous sommes allés au bout de notre engagement d'aider financièrement l'association les amoureux du désert, impliquée dans le développement de Badinko au MALI, village avec lequel l'association travaille en partenariat depuis 11 ans.
Enfin, nous adressons un remerciement tout particulier à l'équipe de Vaccari, pour nous avoir reçu avec autant de gentillesse et pour avoir trouvé des solutions, là où nous pensions les problèmes insolubles.
Voir aussi :
"Préparation des machines et expédition par avion"
"Nos Sponsors"
"Sponsoring et aide au développement avec l'association "LES AMOUREUX DU DESERT"
Quelques images de Buenos Aires

Nous avons passé 4 journées à Buenos Aires. C’est très peu pour apprécier cette belle et grande ville. Pour autant, nous avons été séduits par son patrimoine architectural riche, l’animation des rues, la diversité des quartiers... et l’omniprésence de la musique et du tango...